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« Opérer de vrais choix de vie, ne plus les subir »

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  • Publication publiée :mars 30, 2018
  • Post category:Sociales
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Le 7 mars, une concertation s’est ouverte entre le gouvernement et les partenaires sociaux pour l’élaboration d’un «plan stratégique global en faveur de l’égalité professionnelle». Pascale Coton, viceprésidente de la CFTC, nous dévoile ce qu’on peut en attendre.

La Lettre confédérale : Quelle est la teneur du document de travail que vous a remis le Premier ministre ?

Pascale Coton : Ce document liste dix actions clés pour en finir avec les inégalités femmes-hommes et cinq autres pour mettre un terme aux violences sexistes et sexuelles. La grande priorité, c’est la réduction des écarts salariaux, pour laquelle il s’agit de passer d’une obligation de moyens à une obligation de résultat. À cette fin, un logiciel sera intégré à celui de la paie, pour mesurer ces écarts à la source (1)  , d’après des critères que nous devons établir conjointement avec le gouvernement. Une enveloppe de rattrapage sera mise en place en cas d’inégalité avérée; si celle-ci perdure au-delà de 2022, elle sera sanctionnée par l’inspecteur du travail.

Que faut-il penser de ce projet?

Concernant l’obligation de résultat, il était temps! Voilà des années que la CFTC réclame l’égalité réelle et non théorique. J’ai quand même deux réserves.

La première porte sur l’ambition même de ce projet. Le chiffre sur lequel le document s’appuie est celui des 9% d’écart de rémunération «toutes choses égales par ailleurs», une donnée purement comptable. Sauf que, lorsqu’on prend en compte les autres inégalités professionnelles, de type temps partiel ou manque de mixité des secteurs, des métiers, on obtient un chiffre de 25%! C’est bien à partir de celui-là que l’on devrait travailler, non?

Ma seconde réserve porte sur les moyens. L’enveloppe de rattrapage est une idée judicieuse; en pratique, tout dépend de ses modalités d’utilisation. Idem pour les objectifs de contrôle et d’intervention renforcés de l’inspection du travail – c’était d’ailleurs l’une de nos demandes. Mais pour que ces objectifs soient effectifs, les moyens doivent suivre! C’est cela que nous devons faire préciser au gouvernement.

Y a-t-il d’autres points que vous jugez positifs?

Davantage de droits à la formation seront accordés aux salariés à temps partiel – des femmes à 80%. Nous ne pouvons que nous en réjouir : il y a des années que nous formulons cette demande (2) . Concernant le volet de prévention des violences, l’accent mis sur la formation et la diffusion des outils existants est un excellent point. De même pour la mise en place d’un référent sur ce sujet, formé et identifiable par tous les salariés. En revanche, nous porterons une attention particulière à son statut : si celui-ci n’est pas protégé, son périmètre d’action risque de s’en trouver limité.

Et, à l’inverse, y a-t-il des « blancs », des lacunes, que vous regrettez ?

En miroir de la rémunération de l’activité des femmes, il y a la question de leurs retraites. En moyenne, les femmes perçoivent 993 € de retraite contre 1642€ pour les hommes… Les pensions de réversion et les prestations familiales constituent bien souvent leur unique bouée pour se maintenir à flot. L’égalité ne peut pas se mesurer uniquement à l’aune du salaire; elle englobe d’épineuses questions de société allant de la garde des enfants aux aidants familiaux, en passant par la cherté du logement. En fait, il faut saisir que l’égalité des femmes ne sera concrète que le jour où elles pourront opérer de vrais choix de vie, et non les subir pour des questions financières ou d’impossibles conciliations. Le jour où l’omerta sur les violences qu’elles subissent sera brisée. C’est tout l’enjeu de cette concertation collective.

Quelles sont les échéances pour cette concertation?

 Nous n’avons que cinq semaines pour proposer nos idées et en débattre. Tout sera clos à la mi-avril.

Propos recueillis par MV 1.

(1)Au 1er janvier 2019 pour les entreprises de plus de 250 salariés, au 1er janvier 2020 pour celles qui en comptent 50 à 250 –

(2)« Il faudrait favoriser l’accès des femmes à la formation professionnelle. On pourrait imaginer d’affecter le produit des sanctions financières perçues auprès des entreprises qui ne respectent pas la loi sur l’égalité au financement des frais de formation des femmes », interview de Pascale Coton dans Actuel CE du 8 mars 2016, propos recueillis par Bernard Domergue.

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