La lettre de lâUnion GĂ©nĂ©rale des IngĂ©nieurs, Cadres et AssimilĂ©s CFTC
Janvier / N°128
Les conventions de forfait-jours ont pour particularitĂ© quâelles permettent le versement dâune rĂ©munĂ©ration globale pour le nombre de jours travaillĂ©s au cours de lâannĂ©e. Par consĂ©quent, dans le systĂšme du forfait-jours, on ne distingue pas les heures « normales » des heures supplĂ©mentaires. Ce mĂ©canisme est donc rĂ©servĂ© par lâarticle L. 3121-58 du Code du travail dâune part aux cadres qui disposent dâune autonomie dans lâorganisation de leur emploi du temps et dont la nature des fonctions ne les conduit pas Ă suivre lâhoraire collectif et dâautre part, aux salariĂ©s dont la durĂ©e du travail ne peut ĂȘtre prĂ©dĂ©terminĂ©e et qui disposent dâune rĂ©elle autonomie dans lâorganisation de leur emploi du temps pour lâexercice des responsabilitĂ©s qui leur sont confiĂ©es.
Dans une affaire jugĂ©e rĂ©cemment par la Cour de cassation, plusieurs salariĂ©s, engagĂ©s en qualitĂ© de cadres autonomes* soumis au forfait-jours avaient saisi la juridiction prudâhomale afin de contester la validitĂ© de leur forfait-jours, compte tenu du manque dâautonomie dont ils bĂ©nĂ©ficiaient vraiment.
En effet, bien quâengagĂ©s en qualitĂ© de cadres autonomes*, leurs horaires Ă©taient prĂ©dĂ©terminĂ©s au quotidien et dĂ©pendaient dâun planning collectif mensuel datĂ© et signĂ© par le directeur de leur Ă©tablissement. Il en rĂ©sulte donc quâen pratique, la libertĂ© de ces cadres dans la fixation de leur temps de travail Ă©tait fortement limitĂ©e. Ils devaient en effet ĂȘtre prĂ©sents dans lâĂ©tablissement pendant les horaires Ă©tablis par le planning, sauf cas exceptionnel validĂ© par un supĂ©rieur hiĂ©rarchique. Il Ă©tait Ă©galement par exemple interdit Ă ces cadres de « sauter » la pause dĂ©jeuner pour finir plus tĂŽt. Ces cadres, pourtant qualifiĂ©s dâautonomes, Ă©taient donc soumis Ă un planning contraignant, imposant leur prĂ©sence au sein de lâĂ©tablissement Ă des horaires prĂ©dĂ©terminĂ©es.
Pour la Cour de cassation, ces sujĂ©tions sont parfaitement antinomiques avec la notion de cadre autonome. Elle en dĂ©duit trĂšs logiquement que lâemployeur ne pouvait recourir Ă une convention de forfait en jours. La consĂ©quence est, comme toujours dans ces affaires, lâapplication du droit commun de la durĂ©e du travail, lequel suppose un dĂ©compte des heures supplĂ©mentaires sur la base des heures rĂ©ellement effectuĂ©es et donc un rappel dâheures supplĂ©mentaires dans la limite de trois ans pour le salariĂ©.
La CFTC Cadres tient Ă rappeler que le mĂ©canisme du forfait-jours peut prĂ©senter certains dangers pour la santĂ© des salariĂ©s, notamment en termes de charge et dâamplitude de travail. En effet, les salariĂ©s soumis Ă une convention de forfait-jours ne bĂ©nĂ©ficient pas de lâapplication des dispositions du Code du travail relatives Ă la durĂ©e lĂ©gale du travail, Ă la durĂ©e quotidienne maximale de travail et aux durĂ©es maximales de travail hebdomadaire. Seules leur sont applicables les dispositions concernant le respect des temps minimaux de repos (11 heures par jour â 9 heures en cas de prĂ©vision conventionnelle) et des repos minimaux hebdomadaires (24 heures auxquelles sâajoutent 11 heures de repos quotidien). Un salariĂ© ayant conclu une convention de forfait-jours peut ainsi lĂ©galement travailler quasiment 13 heures par jour pendant 6 jours par semaine, pour un total de 78 heures dans la semaine.
Soc. 15 décembre 2016 n° 15-1756
*La loi Aubry II du 19 janvier 2000 dĂ©finit trois catĂ©gories de cadres : les cadres intĂ©grĂ©s, soumis au droit commun, les cadres autonomes, et les cadres dirigeants Â