Obligation de discrétion et de réserve : quelle étendue ?

 

chut-720pxChaque salarié a, dans le cadre de son contrat de travail une obligation générale de discrétion et de réserve. Il ne doit pas divulguer les informations confidentielles auxquelles il a eu accès à des tiers. Le salarié doit respecter cette obligation aussi bien à l’égard des autres salariés de l’entreprise qu’à l’égard des personnes extérieures.

Plus les fonctions du salarié sont importantes, plus cette obligation est forte. Ainsi, de par sa position dans la hiérarchie, le cadre a une obligation de réserve et de discrétion renforcée au sein de l’entreprise.

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Cette obligation peut également être renforcée par une clause dite de secret professionnel ou de confidentialité qui interdit au salarié de divulguer certains sujets précisément définis comme un projet ou une technique sur laquelle il travaille

La violation de l’obligation de discrétion peut constituer une cause réelle et sérieuse de licenciement voir une faute grave.  Par exemple, a été reconnu comme justifié le licenciement pour faute grave d’un salarié qui avait porté à la connaissance du Comité d’entreprise « des informations confidentielles de nature à inquiéter les salariés et à déstabiliser l’entreprise » (Cour de cassation, chambre sociale, 30 septembre 2003, n° 01-44998).

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Le salarié a également une obligation de secret professionnel, s’agissant des procédés de fabrication dont il pourrait avoir connaissance (Code du travail, art. L. 1227-1)

Sous réserve de ne pas manquer à ses obligations de discrétion et de réserve, le salarié bénéficie d’une liberté d’expression pendant et sur les lieux de travail (C. trav., art. L. 2281-4).

 Liberté d’expression : les limites

Chaque salarié a la possibilité de s’exprimer directement sur le travail qu’il effectue (C. trav., art. L 2281-1). Le fait de donner son opinion ne peut en effet pas justifier une sanction (C. trav.,, art. L. 2281-3).

La Cour de cassation a d’ailleurs récemment rappelé que « le salarié jouit dans l’entreprise et en dehors de celle-ci, de sa liberté d’expression à laquelle seules les restrictions justifiées par la nature de la tâche à accomplir et proportionnées au but recherché peuvent être apportées ».
Il en va toutefois différemment si le salarié commet un abus dans sa liberté d’expression.

La limite à la liberté d’expression est ainsi atteinte lorsque les propos tenus relèvent :

  • de l’indiscrétion ou de la divulgation d’informations confidentielles (il y a alors manquement à l’obligation de discrétion et de réserve)
  • de la critique malveillante, de l’injure, du dénigrement, de la diffamation.

EXEMPLE

Un directeur commercial adresse au conseil d’administration et aux dirigeants de la société mère une lettre dans laquelle il fait notamment état de « décisions incohérentes et contradictoires qui compromettent la pérennité de l’entreprise », et de « désordre interne, détournement, abus d’autorité, conséquences financières et sociales désastreuses ». Pour la Cour de cassation, cette lettre ne comporte pas de termes injurieux, diffamatoires ou excessifs. Il n’y a donc pas atteinte à la liberté d’expression (Cour de cassation, chambre sociale, 27 mars 2013, 11-19734)Sous réserve de ne pas dépasser ces limites, un salarié peut donc tout dire à un ami au travail.

Attention toutefois aux propos tenus sur les réseaux sociaux notamment lorsque l’on sort des limites de la liberté d’expression et que l’espace se révèle être public. 

Anne-Lise Castell pour TISSOT

Cour de cassation, chambre sociale, 14 novembre 2013, n° 12-10082 et Cour de cassation, chambre sociale, 27 mars 2013, n° 11-19734 (sauf abus, le salarié jouit dans l’entreprise et en dehors de celle-ci, de sa liberté d’expression)

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