Philippe Eliakim – Capital – jeudi 11 avril 2019
Officiellement, la réforme des retraites doit mettre fin aux privilèges hors de prix dont profitent cheminots, agents d’EDF ou salariés de la RATP. Mais dans les faits…Le saviez-vous? En France, il existe deux catégories d’aides-soignantes : celles qui travaillent dans des établissements publics et celles qui travaillent dans des établissements privés. Les premières font la toilette des malades, vident les bassins et prêtent main-forte aux infirmières en cas de coup dur. Les secondes font la toilette des malades, vident les bassins et prêtent main-forte aux infirmières en cas de coup dur. Comme vous pouvez le constater, la tâche des premières est plus pénible que celle des secondes. C’est la raison pour laquelle le législateur, dans sa grande sagesse, permet aux aides-soignantes des établissements publics de cesser leur activité à 57 ans, et impose à celles des établissements privés de rester en poste jusqu’à 62. Pour des taux de cotisation identiques, bien sûr.
Ubuesque? Peut-être, mais pas du tout exceptionnel. Dans leurs replis discrets, les régimes spéciaux de retraite sécrètent tout un tas d’inégalités de ce calibre. Par exemple, il vaut mieux conduire un bus à Paris qu’en province (départ possible à 52 ans contre 62), entretenir des voies ferrées que des routes (départ à 57 ans contre 62), fabriquer les décors de la Comédie-Française que ceux des autres théâtres (départ à 57 ans contre 62), être policier national que policier municipal (départ à 52 ans contre 57). Et pour les danseuses, c’est carrément le grand écart : alors que celles de l’Opéra de Paris peuvent cesser les entrechats à 40 ans, les tutus des troupes privées doivent attendre… vingt-deux ans de plus pour raccrocher les ballerines. Du délire.