Marie-Cécile Renault – Le Figaro – mardi 12 juin 2018
L’association UFC que Choisir dénonce une hausse de 47% en onze ans du tarif des complémentaires santé et le manque de lisibilité des contrats qui empêche les assurés de faire jouer le jeu de la concurrence.
Alors même qu’Emmanuel Macron, en déplacement mercredi à Montpellier au 42e congrès de la Mutualité, doit annoncer le remboursement à 100% sur les lunettes, le dentaire et les audioprothèses promis durant la campagne, où les complémentaires santé vont être mises à contribution, l’association UFC-Que choisir dénonce «les nombreuses défaillances du secteur» et un «marché malsain».
L’association de défense des consommateurs pointe la dérive des frais de gestion des organismes complémentaires d’assurance maladie et le manque de lisibilité des contrats qui fausse le jeu de la concurrence, alors que la cotisation moyenne à une complémentaire santé s’élève en 2017 à 688 euros par an, soit 47 % de plus qu’en 2006. «Les cotisations complémentaires ont progressé trois fois plus vite que l’inflation sur la dernière décennie», s’indigne Alain Bazot, président d’UFC. Si des hausses de fiscalité sur les contrats sont intervenues, elles n’expliquent que moins du tiers de la hausse des cotisations.
La hausse du prix des complémentaires tient surtout à «l’inquiétante dérive des frais de gestion et de communication», affirme UFC-Que Choisir, qui pointe notamment le choix de telle ou telle mutuelle «de sponsoriser un bateau, une équipe cycliste, ou de dispendieuses campagnes de publicité».
Les organismes complémentaires ont ainsi dépensé 7,2 milliards d’euros en 2016 pour leurs frais de gestion, soit 20 % des cotisations hors taxes. Sur ce total, plus de 2,8 milliards d’euros ont été consacrés aux frais d’acquisition, notamment en publicité et communication. Aidée par les consommateurs qui ont répondu à son appel, l’UFC-Que Choisir a décortiqué plus de 200 avis d’échéance d’assurance santé. Il en ressort une très grande variabilité des frais de gestion des contrats santé individuels, qui s’étalent de 9 % à 42 % des cotisations.
Si l’on y ajoute les taxes et la marge des organismes assureurs, les consommateurs sont donc loin de s’y retrouver! En moyenne, seulement 70 % des cotisations reviennent à la communauté des assurés sous forme de prestations, et même 66 % pour les contrats individuels, selon l’association. «Pour les contrats avec le plus de frais, le taux de redistribution des cotisations descend même sous les 50 %: moins d’un euro cotisé sur deux revient alors aux assurés», indique Alain Bazot.
Or, il est impossible aux consommateurs de se retrouver dans le maquis des contrats, pour la plupart illisibles et incomparables: malgré les promesses, 80 % des complémentaires n’utilisent pas le vocabulaire commun défini, 38 % jouent de la confusion entre les remboursements de l’assurance maladie et les leurs, et 62 % continuent à utiliser des pourcentages de remboursement au-delà de 100 % (jusqu’à 300 %, 400 % voire 500 %) pour les soins dentaires. Résultat, selon l’enquête d’UFC, 37 % des consommateurs estiment difficiles à comprendre leurs garanties santé, et 48 % ne sont pas en mesure de connaître à l’avance leur remboursement pour des soins importants .
Dénonçant la «passivité des pouvoirs publics» face à cette situation, UFC-Que Choisir réclame une réglementation permettant la lisibilité et la comparabilité des contrats, et une meilleure transparence sur les frais de gestion, avec en particulier une information sur le taux de redistribution disponible avant la souscription.