Forfait jours : les risques du forfait jours…
Le forfait en jours a encore fait parler de lui cette année. La Cour de cassation a, en effet, épinglé l’accord de branche SYNTEC dont les dispositions n’assuraient pas la protection de la sécurité et de la santé des salariés. La Cour de cassation, une nouvelle fois, ne remet pas en cause le système du forfait jours mais l’employeur a des obligations.
Rappel de quelques règles.
Forfait jours : autorisé par un accord collectif
Le recours au forfait annuel en jours n’est envisageable que si un accord collectif d’entreprise ou d’établissement ou, à défaut, une convention ou un accord de branche l’autorise expressément (Code du travail, art. L. 3121-39).
L’accord d’entreprise prime sur l’accord de branche
L’accord collectif doit au préalable déterminer :
- les catégories de salariés susceptibles de conclure une convention individuelle de forfait jours ;
- la durée annuelle du travail à partir de laquelle le forfait est établi. Le nombre de jours travaillés dans l’année « forfaitisé » fixé par l’accord collectif ne peut excéder 218 jours. Le salarié est tenu de travailler le nombre de jours indiqué dans l’accord collectif. L’employeur ne peut, sans son accord, lui imposer de travailler au-delà de ce plafond. Il reste néanmoins possible de convenir au niveau de la branche ou de l’entreprise d’un nombre moins élevé de jours travaillés au cours de l’année. Ce plafond de 218 jours s’apprécie sur l’année de référence choisie par l’accord collectif : année civile, année de référence des congés payés ou toute autre période de 12 mois ;
- les modalités de décompte des journées ou demi-journées travaillées, les modalités de prise des journées ou demi-journées de repos, les modalities concrètes d’application des règles sur le repos quotidien, le repos hebdomadaire, et l’interdiction de travail plus de 6 jours par semaine ;
- les conditions de contrôle de l’application de ce type de forfait, les modalités de suivi de l’organisation du travail des intéressés, l’amplitude de leurs journées de travail et la charge de travail en résultant.
Il faut absolument que ces modalités soient fixées par l’accord collectif. Les dispositions de l’accord collectif doivent être de nature à assurer la protection de la sécurité et de la santé du salarié soumis au forfait jours.
Les défaillances de l’accord collectif ne pourront pas être corrigées par la convention de forfait qui est signée par le salarié. Dans une telle situation, la convention de forfait sera privée d’effet…
Forfait jours : salariés concernés
Il est possible de conclure une convention de forfait en jours sur l’année avec :
- un salarié cadre autonome ;
- un salarié non-cadre qui dispose d’une réelle autonomie dans organisation de son emploi du temps pour l’exercice de ses responsabilités.
Attention, il faut que les salariés concernés aient signé une convention de forfait. Sans cette convention, Il n’y a pas de forfait jours et ils pourront prétendre au paiement d’heures supplémentaires.
Il faut également savoir qu’est considéré comme du travail dissimulé, le fait pour l’employeur de ne pas mentionner de façon intentionnelle sur le bulletin de paie le nombre d’heures de travail réellement accompli par le salarié (Code du travail, art.L8221-5).
Et le fait d’appliquer au salarié le système du forfait en jours sans convention fait ressortir ce caractère intentionnel de l’absence de la mention, sur les bulletins de paie, de toutes les heures accomplies au-delà de la durée légale.
L’indemnité forfaitaire pour travail dissimulé est égale à 6 mois de salaire (Code du travail, art. L. 8223-1)
Forfait jours : décompter le temps de travail
Les salariés en forfait jours ne décomptent pas leur temps de travail en heures. Ils ont conclu une convention de forfait en jours, c’est-à-dire qu’ils travaillent un certain nombre de jours dans l’année.
Le nombre de jours de repos varie chaque année afin d’éviter le dépassement du forfait jours. Le nombre de jours de repos est recalculé tous les ans. Pour vous aider, cliquer pour connaître la méthode à suivre (source Éditions Tissot).
Le nombre de jours de repos est fixé forfaitairement, et correspond à la différence entre le nombre de jours pouvant être travaillés dans l’année et le nombre de jours fixé par la convention de forfait. Une absence pour maladie ne peut pas être déduite du nombre de jours de repos.
Ayant obligatoirement conclu une convention de forfait en jours, les salariés ne sont pas soumis aux dispositions relatives :
- à la durée légale hebdomadaire de travail (Code du travail, art. L. 3121-10) ;
- à la durée quotidienne maximale de travail (art. L. 3121-34) ;
- aux durées hebdomadaires maximales de travail (art. L. 3121-35 et suiv.).
Plus clairement, les salariés en forfait jours ne sont pas soumis :
- à la durée légale hebdomadaire de travail, soit 35 heures par semaine ;
- ni à la durée quotidienne maximale de travail, soit 10 heures par jour.
Cela ne veut pas dire qu’il n’y a pas de limites en matière de durée de travail. Ces dernières découlent des temps de repos obligatoires.
En effet, tout salarié a droit à :
- un repos quotidien d’une durée minimale de 11 heures consécutives ;
- un repos hebdomadaire d’une durée minimale de 24 heures consecutives auxquelles s’ajoutent les 11 heures du repos quotidien.
A partir de ces heures de repos obligatoires, on déduit que le salarié en forfait jours ne peut pas travailler plus de 78 heures par semaine.
Forfait jours : entretien annuel obligatoire
Un entretien annuel individuel doit être organisé par l’employeur, avec chaque salarié ayant conclu une convention de forfait en jours sur l’année. Il porte sur :
- la charge de travail du salarié ;
- l’organisation du travail dans l’entreprise ;
- l’articulation entre l’activité professionnelle et la vie personnelle et familiale ;
- la rémunération du salarié (Code du travail, art.L3121-46).
Lorsqu’un salarié ayant conclu une convention de forfait en jours perçoit une rémunération manifestement sans rapport avec les sujétions qui lui sont imposées, il peut saisir le juge judiciaire. Il demandera que lui soit allouée une indemnité calculée en fonction du préjudice subi, compte tenu notamment du niveau du salaire pratiqué dans l’entreprise et correspondant à sa qualification.