La placardisation est-elle une forme de harcèlement moral au travail ?

Le droit consacre une définition large du harcèlement moral au travail.

L’article L 1152-1 du code du Travail qualifie de harcèlement moral un ensemble « d’agissements répétés », lesquels ont pour objet ou pour effet « une dégradation [des] conditions de travail [du salarié] » qui est « susceptible de porter atteinte [aux] droits et à [la] dignité du salarié, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel ».

Cela signifie qu’un agissement même passif, affectant le salarié dans son travail, pourra être qualifié de « harcèlement moral ».

 

Ainsi, par exemple, la placardisation, un refus d’évolution de carrière ou une mauvaise communication peuvent être constitutifs de harcèlement moral.

 

Le Tribunal Administratif de Nantes a, par une décision du 16 octobre 2003, condamné une commune pour avoir « placardisé » l’un de ses employés fonctionnaire. En effet, le Tribunal relevait qu’« aucune mission [n’avait] été confiée » au salarié, ce qui l’avait empêché d’exercer une « fonction effective ». Or, comme le rappelle le Tribunal, tout fonctionnaire en activité a le droit de « de recevoir, dans un délai raisonnable, une affectation correspondant à son grade ».

  • La placardisation comme réponse de l’employeur aux revendications de son salarié ?

Le salarié « sous-rémunéré » au regard de ses compétences, peut hésiter à demander la rémunération dont il pourrait légitimement se prévaloir, au regard des barèmes de salaire, instaurés par la convention collective, dont relève l’entreprise.

Plus encore, celui-ci peut effectuer des heures supplémentaires sans qu’elles soient déclarées ou même rémunérées ou compensées par des jours de récupérations. Le salarié peut être réticent à revendiquer une reconnaissance de son travail réel auprès de son employeur par peur de perdre son emploi et de devoir s’inscrire au Pôle emploi.

En effet, dans ce cas précis, un rapport de force s’installe entre l’employeur et son salarié, lequel est subordonné à l’autorité de l’employeur qui lui verse le salaire. Certains salariés craignant de perdre leur travail et leur salaire, préfèrent garder le silence et ne pas revendiquer leurs droits en matière de juste rémunération.

Les Conseils de Prud’hommes ou encore les Cours d’Appel sont confrontés à ce type de litige.

Ainsi, dans une décision du 2 juin 2020, la Cour d’Appel de Paris a reconnu que la mise à l’écart, est constitutive de harcèlement moral. Que cette mise à l’écart avait pour effet de créer une situation d’ennui au travail aussi appelé « bore-out ». Elle a, par la même, condamné l’employeur à verser une indemnisation à son salarié, tenant compte de son âge et de sa capacité à retrouver un emploi. La perte de revenus qui était intervenue après le licenciement du salarié a donc été atténuée, puisque celui-ci a été déclaré nul par la Cour d’Appel de Paris.

 EN CONCLUSION

Ainsi le droit, dans un objectif de protection des salariés, condamne les comportements visant à exclure, autrement dit à « mettre au placard » ces derniers. Le salarié a le droit de travailler dans un environnement paisible et de connaître une évolution de carrière.

Les phénomènes de « placardisation » et de « bore out » peuvent également apparaître en cas de télétravail, où il est parfois plus difficile de prouver une mise à l’écart lorsque l’on travaille chez soi, derrière un écran.

rédigé par Catherine GUYARD (extrait)

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