Le réformisme, question centrale à la CFDT

Libération Par Amandine Cailhol — 3 juin 2018 à 20:16

Le syndicat, devenu cette année le premier dans le secteur privé, ouvre ce lundi son 49e congrès. La ligne qu’il revendique lui vaut de nouveaux adhérents, mais aussi le départ de ceux qui l’accusent de complaisance avec le pouvoir.

  • Le réformisme, question centrale à la CFDT

«Se projeter vers l’avenir en débattant ensemble de nos orientations», «faire le bilan de nos quatre ans d’action syndicale» : tel est, selon Laurent Berger, le programme de la CFDT qui organise, à partir de ce lundi, son 49e congrès à Rennes. Près de 3 000 délégués sont invités à en débattre pendant cinq jours. Ces quatre années «n’ont pas toujours été faciles», reconnaît Laurent Berger, candidat à sa propre succession pour un troisième mandat au poste de secrétaire général du syndicat.

«Cap»

 Au rang des réussites, le cédétiste pointe «de nouveaux droits pour les travailleurs» – comme l’augmentation de l’indemnité légale de licenciement, dans le cadre de la réforme du code du travail par ordonnances, ou encore l’amélioration du compte personnel de formation, deux exemples mis en avant par la CFDT – et des catastrophes sociales évitées. Surtout, 2017 aura été l’année d’une victoire historique pour la CFDT qui a réussi à arracher à la CGT la première place sur l’échiquier syndical. Abandonnant son statut d’éternelle deuxième, la centrale est officiellement devenue le 31 mars, lors de la dernière mesure de la représentativité, la première organisation en nombre de voix aux élections professionnelles dans le privé, avec un score de 26,37 % (contre 24,85 % pour la CGT).

Mais la fête a été de courte durée. Car il ne suffit pas d’être premier pour avoir du poids, encore faut-il avoir un interlocuteur à l’écoute. Face à un exécutif qui enchaîne les réformes, tout en accordant un rôle secondaire aux partenaires sociaux, la CFDT cherche sa place. A côté de la CGT qui durcit le ton et de FO qui, après les années Mailly, pourrait être tentée de la rejoindre, la CFDT, elle, veut «garder [son] cap» : contester certaines mesures, sans tomber dans une opposition qu’elle juge trop radicale – ce qui, selon Berger, serait «mortifère» – et continuer à chercher le compromis. Et ce même si les concessions du gouvernement sont limitées.

Carrefour

Dans son projet de résolution générale, la centrale promet de «redonner du sens au travail» en défendant une «codétermination à la française», de «développer un syndicalisme de services», de continuer à «participer à la construction de l’intérêt général par la confrontation des points de vue» et de «ne pas fantasmer le monde mais de l’appréhender tel qu’il est». Mis au vote vendredi, le texte pourrait – tout comme le rapport d’activité présenté au cours des premiers jours – faire l’objet de quelques critiques. D’aucuns voudraient voir leur syndicat hausser le ton. La fédération de la métallurgie, qui avait appelé la confédération – sans succès – à lancer un appel national de mobilisation contre les ordonnances fin 2017, pourrait être aux premières loges. Sans, semble-t-il, ébranler la centrale qui table sur une hausse de 20 % de ses adhérents en quatre ans. Mi-mai, elle s’est d’ailleurs lancée dans une opération «transparence» en adoptant un nouveau mode de calcul.

Résultat, selon cette évaluation, en 2017, la CFDT comptait 623 802 adhérents, bien loin des 860 000 revendiqués depuis 2012. Un différentiel lié au changement méthodologique, assure Laurent Berger, qui explique que depuis des années, la CFDT «alterne augmentations et érosions». En 2017, la tendance était à la baisse (moins 0,9 % des effectifs), avec 60 000 arrivées et 67 000 départs. Un carrefour où se croisent de nouvelles recrues enthousiastes, convaincues par un syndicalisme réformiste, mais aussi des déçus d’une ligne jugée trop complaisante avec le pouvoir. Finalement, on adhère ou on quitte la CFDT pour les mêmes raisons : Libération est allé à la rencontre de militants pour recueillir la parole de deux nouveaux et de deux anciens cédétistes qui analysent la stratégie du syndicat de la rue de Belleville.

Amandine Cailhol

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