La CFTC interpelle les candidats

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  • Publication publiĂ©e :mars 9, 2017
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La lettre, en date du 9 mars, est signée par Philippe Louis, son président, et par Bernard Sagez, son secrétaire général. Dans ce courrier, adressé aux candidats à l’élection présidentielle, la CFTC les interpelle à partir de ses préoccupations syndicales. Deux postulants à l’Élysée n’en sont pas destinataires : Marine Le Pen et Jean-Luc Mélenchon, dont les propositions sont jugées, aux yeux de la centrale chrétienne, « rédhibitoires, comme la sortie de l’Europe » et, pour la première, « la préférence nationale«. Il est vrai que, par deux fois, le Front national a semé le trouble dans cette organisation. En octobre 2016,  Joseph Thouvenel, son vice-président, avait participé, « à titre personnel«, à un rassemblement de La Manif pour tous, place du Trocadéro à Paris, où il avait prononcé un violent discours contre les « élites déliquescentes » et où il s’était fait photographier aux côtés de Marion Maréchal-Le Pen, députée FN du Vaucluse. La CFTC avait dû rappeler son « désaccord total avec ce parti, empêchant ainsi toutes relations ».

Plus récemment, en janvier, la centrale avait dû mettre fin au contrat d’association entre son syndicat de police et la Fédération professionnelle indépendante de la police (FPIP), une organisation étiquetée à l’extrême droite qui, dans un tract avec le sigle CFTC, avait chanté les louanges de Mme Maréchal-Le Pen. Dans son courrier aux candidats, la CFTC se déclare non partisane et « soucieuse de son devoir de neutralité », tout en se définissant curieusement comme une « organisation politique au sens premier du terme (contribution à l’édification de la cité) ». Elle souligne qu’elle « entend transformer l
a société par la recherche du bien commun  et la concorde sociale et non par le développement systématique des antagonismes ».

Onze grandes thĂ©matiques sont passĂ©es en revue. Pour Philippe Louis, « il est impĂ©ratif que le prochain prĂ©sident de la RĂ©publique oriente sa politique de protection sociale et d’emploi vers une sĂ©curisation des parcours de vie accrue, vers une Ă©volution plus ambitieuse de ce dispositif, un rĂ©gime social universel d’activitĂ© que nous appelons de nos vĹ“ux pour crĂ©er de nouveaux droits lĂ©gitimes pour tous ». Ă€ propos de l’ »ubĂ©risation » de la sociĂ©tĂ©, elle demande aux candidats quelle politique ils mettraient en place « pour accompagner l’essor de ces nouvelles formes d’emploi sans remettre en question les droits sociaux des travailleurs ».

Au revenu universel, elle oppose un « revenu de dignité«. Elle préconise un «revenu contributif» qui, «conditionné à l’exercice d’une activité reconnue », « agirait comme un complément de revenu durant les transitions professionnelles afin de sécuriser/encourager celles-ci. Il garantirait également un niveau de revenu digne ». Elle sollicite le soutien des candidats pour l’organisation d’un « Grenelle du numérique et de la robotique » et le lancement d’une « campagne nationale de sensibilisation au bien-être au travail ». Elle défend le compte pénibilité – en demandant aux destinataires de son courrier s’ils veulent le pérenniser, le modifier ou le supprimer – ainsi que le compte personnel d’activité, introduit par la loi El Khomri, auquel elle souhaite ajouter le droit au logement et un compte temps.

Sur la santé, la CFTC demande aux candidats si il y a « matière à repenser cette architecture de la couverture de soins afin d’en améliorer l’efficacité, en réduisant notamment le reste à charge à l’instar du régime d’Alsace-Moselle d’assurance-maladie«. Son interpellation vise aussi les thèmes de la retraite et de la famille. Elle s’oppose à la nécessité d’une nouvelle réforme et à un relèvement de l’âge légal à 65 ans  et juge « souhaitable de favoriser la retraite choisie ».  « Que comptez-vous faire pour valoriser le temps consacré à leur famille (enfants et ascendants) de ceux qui font ce choix, à un ou plusieurs moments de leur vie?, interroge-t-elle. Seriez-vous prêt à reconnaître ce temps comme une activité à part entière? ». Pour que la France respecte l’accord de Paris sur le climat, elle se prononce pour une politique environnementale ambitieuse et réclame une fiscalité écologique.

La CFTC interpelle aussi les candidats sur leur conception des services publics et l’évolution des effectifs de la fonction publique, en réaffirmant son attachement à « l’existence de services publics de qualité, disposant de moyens humains et matériels pour remplir leurs missions au service de la population sur tout le territoire national ». Sur l’Europe, elle dénonce « de forts déséquilibres et une concurrence déloyale de la part de certains États » et s’inquiète de l’impasse sur la révision de la directive sur le détachement des travailleurs. « Êtes-vous favorable à une harmonisation de la législation sociale, environnementale et fiscale européenne? », interroge-t-elle. Sa dernière thématique concerne « la démocratie sociale » – une formule absente de la plupart des programmes – sur laquelle elle attend des « mesures pour la formalisation d’un dialogue sociale efficient «  qui « puisse permettre à chaque voix du syndicalisme de s’exprimer ». Réclamant le respect des corps intermédiaires, elle juge « nécessaire de poursuivre les réformes visant un dialogue social performant que ce soit au niveau national, au niveau des branches et encore de l’entreprise ».

La centrale chrétienne prévient les destinataires de son courrier qu’elle publiera leurs réponses en ligne sur son site internet, « sans aucun jugement de valeur ». Comme à l’accoutumée, elle ne donnera aucune consigne de vote. Mais Philippe Louis continuera à rencontrer les candidats en dehors de ceux précités. Il s’est déjà entretenu avec Benoît Hamon et Jean Pisani-Ferry, qui pilote le programme économique d’Emmanuel Macron, et devait de nouveau voir, jeudi 9 mars, Gérard Larcher, le président du Sénat, chargé par François Fillon d’auditionner les partenaires sociaux.

Le blog de Michel Noblecourt (Le Monde)

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